dimanche 30 octobre 2011

Ressources Inhumaines le gardiens de camps deconcentration et leurs loisirs.

Fabrice d'ALMEIDA a été récompensé par le prix Augustin Thierry pour son livre: Ressources Inhumaines: les gardiens de camps de concentration et leurs loisirs.


Quels objectifs à votre livre?

"Je voulais comprendre comment fonctionnaient les camps de concentration. Je voyais bien le côté des victimes mais moins celui de bourreaux. Il y a environ trois ans, j'ai vu de images de SS qui rigolaient dans des albums de photographies et cela a été le déclic pour faire mon livre. Je me suis rendu compte qu'il n'y avait aucun livre sur les gardiens de camps de concentration."

Quelles sont vos sources?




"Certains collègues ont trouvé des sources sur les aspects de la vie, le fonctionnement administratif et il y avait des sources inédites comme la comptabilité de certains camps se trouvant près de Berlin. On y trouve des factures d'achat de raquettes de tennis, de piano, on a acheté des écrans mais pas pour les détenus, c'était pour les gardien."


Pourquoi y avait-il des loisirs dans ces camps?

"Il faut savoir que les SS étaient l'élite de la société. Les loisirs ont été instaurés car les SS étaient suivis par leur famille. Il fallait occuper les hommes, les femmes et les enfants."

Comment étaient organisés les loisirs?

"Il y avait une gestion des loisirs. On donne aux SS ce qu'il faut pour qu'ils soient en forme et fassent bien leur travail. En organisant des loisirs on voulait faire des camps de concentration une sorte de ville. Je voulais poser cette question: Comment ces gens pouvaient avoir ce côté bien être et pratiquer la violence tous les jours."
Le livre finit d'ailleur par cette phrase: Dans les camps de concentration et d'extermination, les bourreaux n'ont pas seulement massacré des femmes et des enfants, ils ont aussi tué le temps.

La virilité, une question d'époques ?



Cette rencontre, proposée par les éditions du Seuil, réunissait Perrine Kervran (historienne et journaliste) ainsi que les auteurs de l'Histoire de la Virilité sortie quelques jours plus tôt : Jean-Jacques Courtine (professeur à l’université de Paris III Sorbonne Nouvelle), Georges Vigarello (professeur à l’université de Paris V) et Alain Corbin (professeur à l’université de Paris I Panthéon-Sorbonne, malheureusement absent lors de la conférence). Cette oeuvre monumentale d'environ 1600 pages est divisée en trois tomes. Le premier, « L'invention de la virilité de l'Antiquité aux lumières », est dirigé par Georges Vigarello, spécialiste de l'histoire du corps ; le second, « Le triomphe de la virilité, XIXè siècle », par Alain Corbin, spécialiste des mentalités ; le dernier, « La virilité en crise ? Xxè-XXIè siècle », par Jean-Jacques Courtine, plutôt spécialisé dans l'histoire du corps et de l'identité. Ce choix d'un découpage chronologique est une réponse en soi à la problématique : oui, la virilité est une question d'époques. Ce que l'on apprend en revanche, c'est comment celle-ci a évolué.


La virilité est un idéal de perfection, apparu à l'Antiquité. Comme tout idéal, il est inaccessible, d'autant plus qu'il évolue avec les canons de l'époque. Les virilités antique et médiévale, qualifiées de « force abrupte et domination indiscutée » par Georges Vigarello, montrent une affirmation des hommes entres eux, y compris grâce à l'Éros masculin. A l'époque moderne apparaît le gentilhomme, brave, élégant, et coureur de jupons, tandis que l''époque contemporaine est celle d'un homme courageux et autoritaire à l'opposition du lâche, de l'impuissant et de l'efféminé. On remarque que de grandes caractéristiques perdurent, même si elles ne s'affirment pas de la même façon. La force physique et morale, la puissance sexuelle et la domination masculine sont toujours valorisées.

Avec l'affirmation du droit des femmes et l'instauration de lois à l'encontre de la violence domestique, le modèle de l'homme viril, vu comme « macho » est aujourd'hui moqué. Ce phénomène de « dé-virilisation » inquiète certains philosophes et psychanalystes qui déplorent le déclin de l'autorité masculine face à la toute-puissance d'une gente féminine vue comme castratrice.

De mon point de vue, ces inquiétudes sont assez archaïques. En effet, si les femmes demandent, à juste titre, l'égalité et le respect, elles ne demandent pas la mort de l'homme viril. La masculinité doit peu à peu se réinviter et s'adapter aux nouvelles moeurs, comme elle l'a déjà fait, à plusieurs reprises, par le passé.


Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, et Georges Vigarello, Histoire de la virilité, 3 tomes, Éditions du Seuil, 2011.